Quand les données et l'humanité se rencontrent : un algorithme pour améliorer les modèles de tarification des médicaments

Dernière mise à jour : 01 novembre 2019

Vous pouvez légalement accéder à de nouveaux médicaments, même s'ils ne sont pas approuvés dans votre pays.

Apprendre comment

Récemment, everyone.org s'est entretenu avec le professeur Bob Löwenberg, oncologue réputé, et le professeur Carin Uyl-de Groot, économiste de la santé. Löwenberg et Uyl-de Groot possèdent tous deux une vaste expérience et apportent un point de vue important sur l'amélioration de l'accès aux nouveaux médicaments dans un domaine qui mérite d'être étudié : qu'est-ce qu'un prix équitable pour les nouveaux médicaments ?

Löwenberg et Uyl-de Groot ont participé activement à la recherche et à la définition d'une nouvelle approche potentielle pour la fixation du prix des médicaments. En particulier, les médicaments anticancéreux.

Il est clair que les modèles nationaux et internationaux actuels de fixation des prix des médicaments anticancéreux ne sont pas viables. En 2012, 14,1 millions de personnes ont été diagnostiquées avec un cancer dans le monde, et une augmentation de 68 % de l'incidence est prévue d'ici 2030. Cependant, il existe encore de grandes disparités dans les résultats et l'accès aux traitements. Tant au sein des pays riches que dans les pays à faible revenu.

Löwenberg, Uyl-de Groot et une équipe d'experts proposent une solution à portée de main. Ils ont émis l'hypothèse qu'une combinaison de données et de technologies pourrait déterminer des modèles de tarification justes et précis pour les nouveaux médicaments anticancéreux. Le résultat escompté est un processus rationalisé entre l'approbation et les premières ventes de médicaments, et des prix adaptables équitables pour les médicaments afin de favoriser l'accès au niveau mondial.

Le problème, expliquent Löwenberg et Uyl-de Groot, peut être compris de manière générale comme quatre domaines clés à prendre en considération. Premièrement, le marché libre ne fonctionne pas pour les médicaments anticancéreux. En particulier, l'industrie pharmaceutique compétitive et axée sur le profit est alimentée par des attentes de profits élevés dominés par les marchés boursiers. En outre, il existe un déséquilibre en matière d'information entre les médecins, les patients et les entreprises pharmaceutiques, dont les motivations varient. En outre, les acteurs du marché pharmaceutique sont trop peu nombreux et exercent un contrôle quasi monopolistique.

Une deuxième considération est que les prix des médicaments anticancéreux ne sont peut-être pas en corrélation avec les coûts de recherche et de développement. Löwenberg et Uyl-de Groot suggèrent que toutes les phases de R&D sont utilisées pour justifier les coûts élevés des médicaments (alors qu'une grande majorité des médicaments sont abandonnés pendant la phase d'essai) et que les coûts de vente et de marketing des médicaments dépassent de loin ceux de la R&D. Ainsi, les prix élevés fixés pour les nouveaux médicaments anticancéreux ne peuvent être justifiés et nécessitent un nouveau mode d'analyse.

Troisièmement, les négociations de prix au niveau national entre le gouvernement et les représentants de l'industrie ne sont pas transparentes et varient considérablement d'un pays à l'autre.

Enfin, l'accès actuel aux médicaments innovants est inégal. Par exemple, les États-Unis et l'Union européenne ne représentent que 11 % de la population mondiale et 30 % des nouveaux patients atteints de cancer, mais ces régions dominent le marché mondial des médicaments oncologiques, avec une part de marché commune d'environ 78 %. Les dépenses consacrées aux patients atteints de cancer varient d'un territoire à l'autre et l'accès national aux médicaments innovants est inégal.

Un nouveau modèle de tarification construit autour d'un algorithme intelligent vise à résoudre ces problèmes et, en tant que tel, à "faire évoluer" l'industrie de la gestion de la santé. L'algorithme prendrait en compte les coûts de R&D, les coûts de vente, de fabrication et de commercialisation, et adapterait les marges bénéficiaires en fonction du bénéfice clinique, du nombre d'années de brevet et du nombre de patients dans le monde. L'algorithme est donc intelligemment conçu pour stimuler l'innovation, en liant la marge bénéficiaire au niveau de bénéfice clinique du nouveau médicament. Il est également possible d'intégrer dans l'algorithme un facteur spécifique à chaque pays, afin de servir à l'établissement des prix au niveau national.

Ce nouvel algorithme conçu par Löwenberg et Uyl-de Groot transformera les modèles de tarification actuels et fera évoluer l'industrie pharmaceutique afin de mieux servir les patients et les prestataires de soins de santé dans le monde entier.

Notre mission est étroitement liée à celle de Löwenberg et Uyl-de Groot et nous pensons pouvoir travailler en partenariat avec les méthodes de développement et de distribution pharmaceutiques existantes. En travaillant ensemble, nous voulons tirer parti de la technologie, de la science et de l'expertise des spécialistes de l'industrie pharmaceutique pour accélérer le passage de l'approbation à la disponibilité mondiale et à l'accessibilité financière des médicaments pour les patients qui en ont le plus besoin. Cette démarche repose sur la conviction que l'accès à la santé pour tous est la mesure ultime de la dignité humaine.

Ressources : Carin A. Uyl-de Groot et Bob Lowenberg. Durabilité et accessibilité financière des médicaments anticancéreux : un nouveau modèle de tarification. Nature Reviews : Clinical Oncology, 2018.